الثلاثاء، 19 مارس 2013

Civilisations du cerveau gauche


Lucien Israël dans son livre "Cerveau droit, cerveau gauche : cultures et civilisations" fait la distinction entre civilisations basées sur des critères de cerveau droit et, essentiellement aujourd’hui, la civilisation occidentale, fondée sur le mariage, très hémisphère gauche, du génie Grec et de la culture judéo-chrétienne. D’autres civilisations se sont, au cours de l’Histoire, développées selon les puissants préceptes du cerveau gauche, des sumériens, aux égyptiens, en passant par les mayas, de la Chine de Confucius à l’Inde des yogis. Elles ont toutes développé une réflexion philosophique très riche, construit une littérature originale, codifié le droit, elles ont pour la plupart été de très grandes civilisations urbaines, impliquant des savoirs théoriques et pratiques très importants, elles ont su modifier l’environnement et le maîtriser au profit des hommes, mais elles se sont toutes éteinte au seuil "de la grande aventure du déchiffrage du monde… au seuil de la société industrielle et de la technologie moderne, qui ne sera empruntée que plus tard à l’Occident." Comme le montrent ces civilisations formidables qui nous ont précédées, et dont les connaissances sont aujourd’hui considérées comme faisant partie du patrimoine de l’humanité, la voie du cerveau gauche ne mène pas qu’à la science.
Dans les sociétés traditionnelles, l’emprise des dieux, des ancêtres, de la magie est encore déterminante alors que la logique, la raison ou la critique ne sont que secondaires. Ce sont des sociétés qui vivent au rythme de l’hémisphère droit, où l’hémisphère gauche n’est pas encore dominant. Ce sont les Indiens d’Amériques, les Aborigènes d’Australie, les cultures africaines, et d’une façon générale, tous les peuples qui ont gardé un contact étroit avec la nature. Depuis Levy-Strauss on sait que ces cultures, souvent appelées primitives, possèdent en fait des langages d’une extrême complexité et d’une précision inouïe pour tout ce qui concerne les relations entre les hommes et la nature. Ce sont des langues concrètes, qui n’utilisent ni prépositions, ni articles, qui ignorent la négation et qui sont éminemment poétiques, c’est-à-dire dont le sens jailli de la juxtaposition d’images évocatrices. Ce sont bien là, nous l’avons vu les caractéristiques du langage de l’hémisphère droit. Aujourd’hui le contact des civilisations traditionnelles avec la civilisation occidentale , par les critères économiques qu’elle impose au monde et par la télévision qui véhicule son "image du monde", amène des peuples entiers à perdre les racines de leurs cultures traditionnelles.
Savoir associer les deux
Lucien Israël montre que si la civilisation de cerveau gauche, qui est la notre, a su, en un temps très court de l’histoire de notre évolution, faire faire un bond prodigieux à l’humanité elle a su aussi, parallèlement, en se dédouanant des impératifs de survie de l’espèce, créer tous les outils de sa propre destruction, et avec elle de la planète entière. L’auteur pense que ce n’est pas un hasard si nous découvrons aujourd’hui les facultés oubliées du cerveau droit, et que notre salut tiens sans doute dans la création d’une civilisation qui saurait associer de façon optimale les capacités de nos deux cerveaux.
L’exemple du Japon
A cet égard la culture japonaise offre des particularités très intéressantes. Le Japon est le seul pays au monde à posséder un double système d’écriture. Dans une même phrase, le japonais associe, en effet, un système digital, conventionnel, l’Iragana, et le système analogique des Kanji chinois. L’Iragana est une écriture syllabique : des phonèmes assemblés forment des mots qui sont reconnus par convention. Les Kanji sont des idéogrammes qui ont une signification par analogie avec le dessin qui les compose, ils représentent, sous une forme très stylisée, des aspects de la réalité. Le caractère "homme" par exemple figure le dessin schématique d’un homme debout. En un seul caractère, le Kanji exprime un concept ainsi que ses nombreux sens dérivés. C’est le contexte qui permettra d’attribuer le sens précis attribué par l’auteur, sans toutefois retirer l’ensemble des connotations qu’apportent les sens associés. Ce système laisse une grande place au non-dit, au vide qui est central dans la culture japonaise et qui, comme dans leur peinture, crée le sens, crée la vie. Cette particularité, vieille de plusieurs siècles, signe une culture qui est à cheval sur les deux tendances du cerveau. Les possibilités rationnelles et logiques de leur cerveau gauche, développées par la partie conventionnelle et digitale de leur écriture, a permis aux japonais d’assimiler et de maîtriser en très peu de temps la science, la technologie et l’économie occidentale, au point d’être aujourd’hui les leaders mondiaux de tous ces secteurs. Par ailleurs, la culture japonaise avait, traditionnellement, poussé très loin le développement de capacités dont on sait aujourd’hui qu’elles relèvent de l’hémisphère droit. Le Japon est, encore aujourd’hui, extrêmement ritualisé, le sens du sacré pénètre tous les gestes du quotidien et anime la nature toute entière. Les arts martiaux, le Zen, la calligraphie, la peinture au lavis, la musique, le théâtre Nô, ou encore l’Ikébana, l’art de l’arrangement floral sont des manifestations d’une notion essentielle au Japon : le Ki. Pour les japonais, le Ki est la force qui traverse tous les êtres vivants, du minéral à l’humain, c’est cette force invisible, insaisissable, et sans forme qui les anime et les maintient en vie. Si l’on ne peut maîtriser consciemment cette énergie, un certain nombre de techniques, comme les arts martiaux ou la méditation permettent de favoriser sa circulation et son expression dans l’être vivant en éliminant les tensions qui l’empêchent de s’écouler. Tensions musculaires et tensions cérébrales sont autant de barrages au Ki qui, comme l’eau quand elle ne peut s’écouler, s’accumule dans le corps et peut occasionner des dégâts important, tels que maladies, accidents, coups et chutes etc. A l’inverse lorsque cette force circule librement dans l’individu, elle est présente et se manifeste dans tous ses actes. Les japonais pensent que par cette énergie, l’homme est relié, ici et maintenant, à tous les êtres vivants passés, présents et à venir, dans tout l’univers. La partie pour le tout, l’analogie, le concret, le positif, la synthèse et le changement de dimension temporelle, tous les attributs du langage de l’hémisphère droit sont bien présents dans cette façon de voir le monde au travers de la notion de Ki dans la culture japonaise. Sauf à imaginer que le Japon renie totalement sa culture traditionnelle au seul profit des valeurs occidentales, ce qui semble très improbable, il sera très intéressant pour l’avenir d’observer comment ce pays réussira ou non à développer une culture qui associe, et non pas qui oppose, nos deux cerveaux.
 
 

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